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Déplacements club

Déplacement à la commision des étoiles doubles de la SAF à Rodez


Ce week-end du 28 au 30 septembre 2018, nous sommes 6 adhérents Dinastro à avoir participé à la réunion de la commission des étoiles doubles de la SAF (Société Astronomique de France), organisée à Rodez.

De gauche à droite : Gérard Vaudescal, René Yken, Pascal Dubarry, Jean-Jacques Castellani, Jean-Pierre Dupré, Yves Argentin.


C’est ma vieille auto, qui nous a emmené tous les six à bon port de Visker à Rodez. Elle a tenu le coup, malgré son grand âge et ses quelques.... 28 milliardièmes d’années-lumière au compteur. Je vous laisse faire la conversion en km, mais c’est déjà beaucoup pour une voiture.


Dès notre arrivée à Rodez, nous avons partagé un petit moment de convivialité :


L’ensemble du rassemblement se passait à l’hôtel Campanile de Rodez, hébergement, repas, et salle de réunion ce qui était très pratique :


Voici comment s’est déroulé ce week-end :

VENDREDI SOIR

 Edgard Soulié, président de la commission, et Laurent Corp nous ont accueilli parmi la trentaine de participants. La présence de six tarbais au sein du groupe n’est pas passée inaperçue, puis nous avons assisté à une première conférence :

 Pierre Durand nous a parlé de François Arago (1786-1853), ce célèbre astronome et homme politique, qui, au cours de sa vie mouvementée aura connu une monarchie, deux républiques et deux empires napoléoniens.
Nous avons donc appris que ce jeune polytechnicien, avait arpenté l’Espagne pour y mesurer le méridien jusqu’aux Baléares, mais qu’il y fut assigné à résidence durant deux ans, suite à la déclaration de guerre entre la France et l’Espagne. Son retour en France fut mouvementé car il du s’évader à deux reprises par bateau en direction d’Alger, avant d’y parvenir. Son retour triomphal à Paris avec toutes ses mesures et ses instruments intacts, lui valut d’être nommé directeur de l’observatoire de Paris, malgré son opposition politique à Napoléon Premier. Au cours de sa vie, son idéal de républicain révolutionnaire en fit un précurseur de la vulgarisation de la science auprès du grand public. Il fut élu député de la Seine et fut même un chef de gouvernement éphémère sous la seconde république. Il mourut en 1853 non sans s’être de nouveau opposé à Napoléon III cette fois-ci. Urbain le Verrier, qui ne partageait pas du tout sa vision politique, et qui du coup n’attendait que ça... lui succéda à la tête de l’observatoire de Paris.

SAMEDI

La journée a été bien chargée car nous avons assisté à pas moins de 8 exposés, tous très intéressants :

 Danielle Briot nous a rappelé l’importance des étoiles doubles en cosmologie, en parlant des supernovae de type SN1a. Ces explosions cataclysmiques ont en effet lieu au sein d’un couple stellaire, dont l’un des composants qui est une naine blanche, absorbe de la matière en provenance de son compagnon qui grossit en évoluant au stade de géante rouge. Lorsque la masse de la naine blanche atteint 1,4 masse solaire (limite de Chandrasekhar) une explosion en supernova se produit détruisant entièrement la naine blanche. Cette explosion impliquant toujours exactement la même quantité de matière émet une intensité lumineuse parfaitement connue. Ce sont donc des chandelles cosmiques, qui permettent d’évaluer les distances très lointaines. Elles ont servi à mettre en évidence l’accélération de l’expansion de l’univers en 1998 par Saul Perlmutter, Brian Schmidt et Adam Riess. Cette découverte majeure leur valut le Prix Nobel de Physique en 2011.

 Raymonde Mat nous a parlé de l’étoile VV Cep. Cette étoile située à 4900 a.l. est la deuxième plus grosse étoile connue. Il s’agit d’une binaire à éclipses dont la principale composante a un diamètre 1900 fois plus gros que celui du soleil. De magnitude 4,9 cette étoile est probablement la plus grosse qui soit visible à l’œil nu. Raymonde Mat nous a présenté ses propres observations aux jumelles, du suivi de la variation de magnitude de ce couple stellaire.

 André Debackère nous a présenté ses travaux sur l’étoile double DBR 89 qu’il a lui même découvert, en utilisant le télescope robotisé Faulkes Telescope North (FTN) situé à Hawaii. Cette étoile double a la particularité de posséder une exo planète. Ses travaux ont consisté à démontrer que le couple d’étoiles était bien une double physique, en mesurant séparément la distance de chacune des composantes. A partir de leur type spectral, qui permet d’évaluer la magnitude absolue de l’étoile, il faut ensuite évaluer son indice de couleur du à l’absorption interstellaire, pour en déduire la distance. Cette étude a prouvé qu’il s’agissait bien d’une étoile double physique et non optique, faisant de cette exo planète en orbite autour d’une étoile double, un cas unique.

 Pierre Durand nous a présenté la revue Observations et Travaux, éditée une ou deux fois par an par la SAF, et disponible pour la somme de 15€ par an. C’est dans cette revue que Gérard avait publié ses mesures d’étoiles doubles.
Il nous a également présenté un tableau d’actualisation des couples étalons, établi par Pierre Laurent, suite à la publication du catalogue Gaïa DR2. Ces étalons sont utilisés pour calibrer les mesures d’étoiles doubles.

 David Antao nous a présenté son travail sur une binaire spectroscopique de type SB2. Grâce à son télescope Newton de 300mm et un spectromètre de type Lhires III, il a pu obtenir un suivi très précis de la période de cette étoile. Nous avons été bluffé par la précision de ses spectres obtenus autour le la raie H-Béta, qu’il a pu superposer sans complexe au dessus de ceux issus du VLT (excusez du peu...) et qui correspondaient parfaitement. Cette étude nous a montré que désormais, le suivi des doubles spectroscopiques est accessible aux astronomes amateurs, ce qui constitue une nouveauté.



 Laurent Corp nous a présenté les différentes méthodes de mesure des minima des binaires à éclipses. La période de l’orbite d’une binaire à éclipses peut être calculée en étudiant sa courbe de lumière, et il est primordial d’en déterminer le moment précis des minima pour définir l’orbite des étoiles. Laurent Corp nous a présenté différents outils mathématiques permettant de déterminer précisément l’instant auquel se produit le minima, à partir des différents points de mesure enregistrés sur la courbe de lumière.

 Daniel Bonneau nous a présenté les résultats de son étude sur l’étoile double spectroscopique Delta Delphini. Cette étoile de magnitude 4,4 visible à l’œil nu, a la particularité d’être constituée par un couple d’étoiles variables de type Delta Scuti orbitant l’une autour de l’autre en 40 jours environ. Elle possède un spectre très complexe car la variabilité de l’éclat des 2 étoiles est du à des pulsations de leur surface, entraînant des modifications de vitesse radiale qui se superposent à celles dues à la vitesse des deux étoiles orbitant l’une autour de l’autre. Comme on ne peut pas visuellement séparer les deux étoiles, l’interprétation du suivi de la courbe de lumière, ainsi que la compréhension du spectre de ce type d’étoiles doubles, sont donc particulièrement complexes.

 Bernard Trégon nous a présenté un interféromètre destiné à être installé sur un C8, qu’il a lui même réalisé. Cet as du bricolage nous a littéralement bluffé par ce montage en forme de poutre, construit à partir de profilés en alu, de 4 miroirs secondaires elliptiques et de vis de réglage micrométriques. Cette poutre et ses miroirs permet d’aller chercher la lumière à l’extérieur du tube optique du télescope dans le but de faire de l’interférométrie. Cet interféromètre est couplé à un oculaire frangeur qu’il a également lui-même réalisé, en coopération avec Antoine Labeyrie pour son futur Hyper-Telescope. Cet oculaire frangeur contient deux prismes réglables, dont l’un des deux est souple, ce qui permet de corriger la longueur des trajets optiques de chaque bras de l’interféromètre, et aussi de ramener la frange principale au milieu du champ du télescope. Bernard Trégon est un véritable génie de l’astro-bidouille, et ce montage peu coûteux et très performant nous a littéralement assis par terre. Il permettra de résoudre des étoiles doubles très serrées avec une précision inégalée pour des amateurs. Le samedi soir, Bernard nous a fait observer les franges d’interférence sur l’étoile Altair, avec un simple C8 et un masque à 2 trous de 40mm placé à l’entrée du tube.


DIMANCHE MATIN

Nous avons eu droit à deux exposés supplémentaires :

 Laurent Corp et André Debackère, nous ont présenté leurs travaux sur une binaire à éclipses à longue période RV Aps, située dans l’hémisphère sud, dans la constellation de l’Oiseau de Paradis. Cette binaire n’avait été observée qu’une seule fois en 1928, puis elle avait fait l’objet d’une publication plus récente en 2006. Ils nous ont expliqué leurs difficultés pour obtenir du temps de télescope au moment précis où avait lieu le minima de l’éclipse, qui se produit tous les 34 jours. Mais ils ont tout de même pu obtenir après plusieurs mois d’observations une jolie courbe de lumière caractérisant précisément cette binaire.

 Bernard Trégon nous a parlé de la possibilité de détecter des étoiles doubles lors d’occultations d’étoiles par les astéroïdes. 1601 étoiles doubles référencées dans le WDS ont été détectées de cette manière. L’avantage est que cette méthode permet de résoudre des couples ayant une séparation très serrée, qui habituellement ne peut être détectée qu’en spectroscopie. Toutefois, il faut pour exploiter la mesure qu’au moins deux observateurs situés sur le trajet de l’ombre de l’astéroïde, aient obtenu une positive. Il faut en effet au moins deux cordes pour permettre d’obtenir une mesure. Cette méthode de détection des doubles, nous a particulièrement interpellé à Dinastro, car nous avons l’habitude de suivre les occultations.


Voilà, un week-end studieux et très instructif, qui je l’espère nous motivera pour de futures observations.

Pour info, le lien vers le site de la commission des étoiles doubles de la SAF : https://saf-astronomie.fr/etoiles-doubles/