L’imagerie du ciel profond nécessite des poses individuelles de l’ordre de 10 à 15 minutes au minimum afin d’obtenir un rapport signal sur bruit suffisamment élevé pour faire ressortir les détails subtils des objets photographiés. Malheureusement, les montures accessibles à l’amateur ne permettent généralement pas de réaliser ce type de pose. Les raisons sont nombreuses : mise en station imparfaite, mauvais alignement de l’axe optique d’un éventuel viseur polaire avec l’axe mécanique, flexion de l’ensemble mécanique monture/instrument, erreur périodique importante de la monture, vitesse de rotation sur l’axe horaire imprécise, etc...
Pour pouvoir réaliser des poses de longues durées (de l’ordre de 10 à 15 minutes, voire plus), la solution consiste à réaliser un autoguidage de l’instrument. Le matériel et le logiciel pour mettre en oeuvre un autoguidage sont maintenant accessibles à des prix raisonnables.
Le but de cet article est de décrire un système d’autoguidage dans le cadre d’une configuration à base de matériels et de logiciels du commerce. La problématique rencontrée ainsi que la démarche adoptée pour arriver à une solution satisfaisante y sont décrites précisément de manière à ce que cette dernière puisse être éventuellement réutilisée dans le cadre d’autres configurations.
Description de la configuration
La configuration utilisée dans le cadre de cet article est la suivante :
- Monture Vixen GP-DX pilotée par un SkySensor 2000 PC ;
- Lunette TeleVue 85 de 600mm de focale avec un correcteur de champ TeleVue qui ramène la focale à 510mm ;
- Caméra CCD SBIG ST-8XME (sans anti-blooming) avec roue à filtre CFW9v2.
- Logiciel Maxim DL Version 4.5 (http://www.cyanogen.com/) pour l’acquisition des images, l’autoguidage, le prétraitement et le traitement des images.
- Logiciel C2A (http://www.astrosurf.com/c2a/index.htm) pour la cartographie stellaire, le pilotage de la monture au travers du SkySensor 2000 PC et le tracé des courbes de dérive de suivi.
Il est à noter que la caméra ST-8XME possède un deuxième capteur CCD intégré à la caméra, capteur qui est dédié à l’autoguidage, ce qui facilite grandement la configuration à mettre en oeuvre.
La figure suivante montre un schéma simplifié de la configuration utilisée :
Les principales caractéristiques optiques de ce montage sont les suivantes :
- La caméra possède un capteur d’imagerie de 1530 par 1020 pixels. Chaque pixel fait 9μ x 9μ et la taille du capteur est donc de 13,8mm par 9,2mm.
- Avec le correcteur de champ, la focale résultante de la lunette TeleVue TV-85 est de 510 mm et le champ sur le CCD d’imagerie est de 1°33’20" x 1°2’13". L’échantillonnage sur ce capteur est donc de 3,65 secondes d’arc par pixel.
- Le CCD de guidage dans la caméra est un TC-237. Ce capteur a une taille de 4,86mm par 3,66mm et possède 656 x 495 pixels (soit 7,4 microns par pixel). Avec le correcteur de champ, l’échantillonnage sur le capteur de guidage est donc de 3 secondes d’arc par pixel.
On remarquera que l’échantillonnage sur le capteur de guidage est inférieur à l’échantillonnage sur le capteur d’imagerie, ce qui est un point important à respecter pour réaliser un autoguidage de qualité.
Problématique
L’utilisation de cette configuration pour réaliser des longues poses de plusieurs dizaines de minutes nécessite une mise en station avec un alignement équatorial (c’est ce mode qui doit donc être réglé dans le contrôleur SkySensor 2000 PC). En effet, la calibration sur 3 points avec le SkySensor 2000 PC sans un alignement polaire soigné provoque une rotation du champ lors de la pose.
Malheureusement, la monture Vixen GP-DX motorisée et pilotée par un contrôleur de type SkySensor 2000 offre une qualité de suivi médiocre avec une erreur périodique significative sur l’axe horaire.
A titre d’exemple, la figure ci-dessous montre la dérive d’une étoile du champ selon la direction en ascension droite (en rouge) et en déclinaison (en bleu) sur une durée d’une quinzaine de minutes. Aucun autoguidage n’est utilisé et l’on mesure simplement la dérive d’une étoile au cours du temps. L’axe vertical est gradué en secondes d’arc et l’axe horizontal en minutes et secondes.
Ce tracé nous renseigne sur deux choses :
- La mise en station de la monture est imparfaite. En effet, on observe une dérive globale de la position de l’étoile dans les deux directions (ascension droite et déclinaison). Cette dérive est représentée par les lignes en pointillés sur le graphique.
- La monture possède une erreur périodique d’une amplitude d’environ 10 secondes d’arc selon une période de 10 minutes (bien visible sur la courbe en rouge).
Même en admettant que l’on puisse améliorer la mise en station (ce qui est faisable en réglant soigneusement le viseur polaire de la monture GP-DX), il est clair que l’erreur périodique empêche à elle seule de réaliser des poses de plus de 2 ou 3 minutes. En effet, la caméra SBIG ST-8XME au foyer de la lunette TeleVue TV-85 avec le correcteur de champ fournit un échantillonnage de 3,64 secondes d’arc par pixel, et on obtiendrait donc un déplacement des objets enregistrés d’un pixel sur le capteur en moins de 5 minutes (ceci dans la plupart des cas puisque cela dépend en fait de l’endroit où l’on se trouve dans le cycle de l’erreur périodique). Ceci n’est bien sûr pas compatible avec des poses de 10 minutes ou plus sur des objets du ciel profond.
Description de la solution adoptée
L’autoguidage consiste à faire l’acquisition de l’image d’une étoile de manière régulière, à mesurer les changements de position de cette étoile sur le capteur CCD dédié à l’autoguidage et à envoyer des ordres aux deux moteurs de la monture de manière à compenser les dérives de suivi et à garder l’étoile à la même position sur le capteur. Dans le cadre de la configuration utilisée ici, un certain nombre d’étapes doivent être respectées avant de lancer l’autoguidage lui-même. Ces étapes sont décrites dans cette section.
Ajustement de l’entraînement mécanique de la monture
Un point fondamental qu’il faut vérifier régulièrement est l’ajustement correct des engrenages des moteurs sur les entraînements en ascension droite et déclinaison. Il faut veiller à ce que le jeu entre les deux pignons soit minimal tout en s’assurant qu’il soit suffisant pour ne pas provoquer des irrégularités dans les mouvements.
La qualité des pignons sur la monture GP-DX laisse quelque peu à désirer et il est très difficile d’arriver à un réglage optimal. Si le jeu est un peu trop important, on observera systématiquement un délai important lors des changements de sens de rotation du moteur, ce qui induit des problèmes pendant l’autoguidage qui manque alors de réactivité. Si le jeu n’est pas assez grand, on peut observer de la « striction » qui produit un effet surprenant : lorsque le moteur change de direction de rotation, l’entraînement du télescope se poursuit malgré tout dans le même sens et « lâche » brutalement quelques instants plus tard en provoquant une brusque rotation dans le sens imposé par le moteur.
Le manque de qualité mécanique de l’entraînement sur les axes d’ascension droite et de déclinaison est en final ce qui va limiter les performances de l’autoguidage que l’on cherche à réaliser. Il convient donc de veiller tout particulièrement à ce que l’ajustement des pignons soit réalisé au mieux.
Equilibrage de la monture
Il est souvent indiqué dans la littérature consacrée à l’autoguidage qu’un léger déséquilibre sur l’axe Alpha (de manière à « tirer » en permanence la charge lors du suivi sidéral) améliore la qualité de l’autoguidage. Ce n’est pas ce que nous avons constaté, et les meilleurs résultats sont obtenus en équilibrant du mieux possible la monture.
Il faut donc soigneusement équilibrer la monture avec l’ensemble des équipements et des câbles en place.
Orientation de la caméra et focalisation
Il est conseillé de faire attention à orienter la caméra de manière à ce que l’axe principal du capteur CCD de guidage soit parallèle à l’une des directions d’ascension droite ou de déclinaison. Ce n’est pas indispensable pour le bon fonctionnement de l’autoguidage, mais cela simplifie grandement l’interprétation des résultats de guidage.
Idéalement, le grand axe du capteur CCD devrait être parallèle à la direction de déplacement en ascension droite, mais il peut aussi être parallèle à la direction de déplacement en déclinaison si cela s’avère plus commode pour positionner la caméra (ce qui est le cas dans le montage présenté ici). Il faut faire alors attention de ne pas confondre les coordonnées (X, Y) du capteur de guidage et les coordonnées (X, Y) du télescope qui correspondent respectivement aux directions d’ascension droite et de déclinaison. Il peut en effet y avoir confusion dans certains écrans de Maxim DL.
Une fois la caméra positionnée, on peut alors réaliser la focalisation de la caméra selon la procédure classique avec Maxim DL (analyse en continu de la FWHM d’une étoile du champ et minimisation de la valeur de celle-ci).
Mise en station de la monture
Réaliser un bon autoguidage nécessite une mise en station de la monture qui soit la meilleure possible. En effet, on cherche à minimiser les corrections à apporter pendant les poses, et ces corrections seront d’autant plus petites et moins fréquentes que la mise en station sera meilleure. La monture Vixen GP-DX possède un viseur polaire qui rend facile une mise ne station relativement précise.
Malgré cela, nous allons volontairement réaliser une mise en station incorrecte ! La raison de cet acte a priori aberrant est la suivante : la plus grande difficulté à résoudre lors de la mise en oeuvre d’une solution d’autoguidage réside dans l’asservissement correct de l’axe de déclinaison. Les jeux dans l’entraînement de cet axe rendent très difficile une correction graduelle et régulière des déplacements dans la direction en déclinaison. Les changements de direction sont mal répercutés et l’on observe soit des réponses très lentes du système (ce qui induit des erreurs de guidage importantes), soit des oscillations dont l’amplitude augmente au cours du temps.
L’idée est donc de provoquer une dérive régulière selon la direction de déclinaison et de réaliser ensuite systématiquement des corrections dans le même sens (qui est le sens opposé à la dérive volontairement induite). Cela permet d’éviter les changements de sens de rotation du moteur de déclinaison et élimine donc les problèmes décrits précédemment. Il faut toutefois faire attention à ne pas introduire une erreur de mise en station trop important car cela induirait une rotation du champ au cours de la pose.
La monture Vixen GP-DX possède un viseur polaire qui permet une mise en station simple en amenant simplement l’étoile Polaire à une position bien précise du réticule éclairé présent dans le viseur. Cette position est représentée en vert dans le schéma ci-dessous, schéma qui montre comment le réticule apparaît dans le viseur polaire (le point vert montre où doit se trouver la Polaire aux alentours de l’an 2008 selon la documentation de la monture).
Pour dérégler légèrement la mise en station, on amène l’étoile Polaire sur le point rouge représenté sur la figure (c’est la position qui est utilisé dans le cadre de l’essai reporté dans cet article, mais rien n’empêche d’utiliser une autre position).
Il faut maintenant repérer le sens de la dérive selon la direction Delta de manière à savoir ensuite quelle direction de correction doit être désactivée lors de l’autoguidage. Pour cela, on débranche le câble d’autoguidage entre la caméra ST-8 et le SkySensor 2000 PC, on lance un « autoguidage » (sans effet puisque le câble est débranché), on enregistre la dérive d’une étoile sur le capteur de guidage et on visualise la courbe de suivi dans Maxim DL ou bien dans C2A.
La copie d’écran ci-dessous montre la dérive enregistrée par Maxim DL. La dérive en ascension droite est marquée « X » et celle en déclinaison est marquée « Y ». Les valeurs de dérive sont données en pixels et le temps est donné en secondes.
La courbe suivante montre le même enregistrement mais affiché dans le logiciel C2A en exploitant le fichier Log produit par Maxim DL (C2A est capable de lire directement le format de Log de Maxim DL). La dérive en ascension droite est tracée en bleu et celle en déclinaison est tracée en rouge. L’axe vertical est gradué en secondes d’arc. Il est à noter que le signe de la dérive en ascension droite est inversé par rapport à la courbe affichée par Maxim DL.
On voit bien apparaître sur cette courbe l’erreur périodique sur l’axe d’ascension droite ainsi que les dérives globales sur les deux axes dues à la mise en station volontairement imparfaite.
La courbe en déclinaison nous montre une dérive régulière en déclinaison de l’ordre de 1,5 seconde d’arc par minute. Il s’agit d’une décroissance selon l’axe Y d’après la terminologie utilisée dans Maxim DL, et il faut donc désactiver le rattrapage en Y- dans l’interface de gestion de l’autoguidage du logiciel. La copie d’écran ci-dessous illustre les réglages utilisés dans Maxim DL quant aux axes pris en charge par le guidage.
On notera que la même technique de désactivation d’une direction de guidage ne peut pas être appliquée à l’axe X (ascension droite) car l’erreur périodique provoque des changements de direction de la dérive selon cet axe malgré la mise en station volontairement imparfaite (ces changements de direction restent très minimes pour la dérive en déclinaison comme on peut le voir sur la courbe en rouge).
Réglage des paramètres
Il existe de très nombreux paramètres qui peuvent influer sur la qualité de l’autoguidage, aussi bien au niveau du contrôleur de télescope (dans notre cas le SkySensor 2000 PC) que du logiciel chargé de mettre ne oeuvre l’autoguidage (ici le logiciel Maxim DL). Seuls de nombreux essais permettent de déterminer comment régler ces différents paramètres pour obtenir un résultat optimum. Il s’agit d’une tâche qui prend beaucoup de temps et d’énergie (sans parler de la frustration de ne pas réellement observer pendant de rares nuits claires...), mais qui est malgré tout indispensable pour obtenir de bons résultats par la suite.
En tout état de cause, les paramètres présentés dans cet article ne sont valables que pour la configuration utilisée. Toutefois, ils sont certainement en grande partie utilisables pour des configurations similaires, aussi bien en termes de matériel que de logiciel. Un tableau à la fin de cet article présente un résumé précis de tous les paramètres utilisés.
Backlashs
Tout d’abord, et malgré l’existence de jeux importants dans les entrainements, il est recommandé de ne pas utiliser de « backlashs » dans le SkySensor 2000 PC et dans les paramètres de guidage du logiciel Maxim DL. Les backlashs permettent de rattraper automatiquement les jeux dans les entraînements lors des changements de direction.
Cela peut paraître surprenant, mais le fait est que l’introduction de ces rattrapages automatiques de jeux amène souvent plus de problèmes qu’elle n’en résout lors de l’autoguidage. Au pire, il faut veiller à ce que les valeurs de backlashs utilisées soient largement inférieures aux valeurs que l’on utiliserait pour compenser complètement les jeux lors de changements de direction à la raquette du télescope.
Intervalle de temps entre deux corrections
L’expérience montre que dans la configuration utilisée, les meilleurs résultats sont obtenus en ne corrigeant pas trop fréquemment les dérives de l’étoile guide. Typiquement, un intervalle de 2 ou 3 secondes entre deux corrections donne de bons résultats. Un intervalle relativement long entre deux corrections présente d’ailleurs plusieurs avantages :
- Cela permet de poser plus longtemps sur l’étoile guide et donc d’utiliser des étoiles guide de magnitude plus élevée ;
- Cela diminue les effets de la turbulence atmosphérique puisque l’on moyenne la position de l’étoile sur une durée plus grande. On évite ainsi de réaliser des corrections sur des changements de position de l’étoile guide qui sont liées à la turbulence atmosphérique ;
- Cela évite de « stresser » le système (PC et contrôleur SkySensor).
Si une pose de 3 secondes sature l’étoile guide, il est possible dans Maxim DL de spécifier un « délai après correction » de manière à obtenir la fréquence de correction voulue.
Vitesse d’autoguidage et PEC
Dans les paramètres du SkySensor 2000 PC, il est possible de spécifier la « vitesse d’autoguidage » comme une fraction de la vitesse sidérale (il s’agit de la vitesse qui sera utilisée par les moteurs pour appliquer les corrections envoyées par le logiciel). La valeur retenue est « x 0.5 », ce qui représente une valeur moyenne recommandée par la documentation du SkySensor. Il faut diminuer cette valeur si l’on souhaite moins d’agressivité dans l’autoguidage ou bien au contraire l’augmenter si l’on souhaite plus d’agressivité (c’est-à-dire un rattrapage plus rapide des déplacements). Utiliser une valeur plus haute que « x 0.5 » peut résulter en des oscillations et cette valeur moyenne paraît bien adaptée.
La correction d’erreur périodique doit être désactivée dans le SkySensor, ceci afin de simplifier le diagnostic d’un éventuel problème de guidage. Sur le fond, rien n’empêche d’utiliser la correction d’erreur périodique, mais puisque l’autoguidage a pour ambition de réaliser de manière autonome les corrections lors d’un suivi, on voit mal pourquoi il faudrait mettre en oeuvre cette fonction...
Agressivité du logiciel de guidage
Le logiciel MaximDL permet de régler l’agressivité du guidage au travers de 2 paramètres, un pour chaque axe télescope (appelés X pour l’axe en ascension droite et Y pour l’axe en déclinaison - à ne pas confondre avec les directions X et Y du capteur de guidage). Ces paramètres peuvent prendre une valeur entre 1 et 10. Dans notre configuration, une valeur de 8 est utilisée sur les deux axes. Le schéma ci-dessous montre deux courbes de suivi d’autoguidage réalisées dans les mêmes conditions, sauf en ce qui concerne l’agressivité. La première (en haut) est réalisée avec une agressivité de 8 et la seconde (en bas) de 4. Les courbes en bleu montrent la dérive sur l’ascension droite et les courbes en rouge montrent la dérive sur la déclinaison. L’axe vertical est gradué en secondes d’arc et la durée d’enregistrement est de 13 minutes environ dans chaque cas.
On voit que les agressivités de 8 donnent un résultat légèrement meilleur sur les deux axes, mais il est clair que dans le cadre de notre configuration, les agressivités déclarées dans le logiciel Maxim DL ont relativement peu d’influence sur la qualité de l’autoguidage. Cette valeur de 8 est d’ailleurs la valeur recommandée par défaut dans l’aide de Maxim DL.
D’une manière générale, il est conseillé d’utiliser les valeurs par défaut des paramètres, sauf si l’on a une bonne raison de ne pas le faire !
Calibration de l’autoguidage
La calibration de l’autoguidage dans Maxim DL est simple et fiable (contrairement à de nombreux autres logiciels...). Toutefois, il faut prendre la précaution d’utiliser pour la calibration une étoile assez brillante et qui surtout soit seule dans le champ du CCD de guidage (avec une différence d’au moins deux magnitudes avec les autres étoiles du champ). Il ne faut pas hésiter à changer de champ pour que cette condition soit réalisée (le mécanisme de GOTO du SkySensor 2000 PC couplé avec la cartographie C2A permet de réaliser cela très facilement). Il est préférable que l’étoile ne soit pas positionnée trop près des bords du champ afin qu’elle ne sorte pas de ce dernier lors de la calibration.
La copie d’écran ci-dessous montre comment on a déplacé le télescope de manière à placer dans le champ du CCD de guidage une étoile brillante isolée.
La durée de calibration utilisée dans Maxim DL est de 20 secondes sur les 2 axes. Dans la configuration optique utilisée, cela suffit à opérer un déplacement de plus de 50 pixels de l’écran lors de la procédure de calibration, ce qui est suffisant.
Avant de lancer la calibration, il est très important de réaliser un petit déplacement dans la direction Delta- (si l’on pointe à l’Ouest) ou Delta+ (si l’on pointe à l’Est) à l’aide de la raquette du SkySensor. Cela permet d’annuler un éventuel jeu dans l’entrainement Delta (en effet, on a décidé de ne pas utiliser de backlash, et aucun jeu n’est compensé). Si l’on ne prend pas cette précaution, la calibration dans Maxim DL a toutes les chances d’échouer car l’étoile de référence peut très bien ne pas bouger du tout lors de l’aller et retour en déclinaison !
Si l’on a pris cette précaution, l’étoile de référence va se déplacer correctement lors de l’aller en déclinaison et elle ne fera qu’une fraction du trajet retour, ce qui ne gène pas la calibration car le logiciel Maxim DL s’attend effectivement à observer un jeu non rattrapé lors du retour de l’étoile vers la position initiale. La copie d’écran ci-dessous montre typiquement ce que l’on obtient à l’écran après que la calibration a été réalisée.
Il est à noter que la calibration doit être effectuée à chaque changement significatif de la position du télescope, spécialement lorsque l’on change de manière important la déclinaison du champ observé. Nous avons constaté que le simple changement de la valeur de déclinaison dans l’interface de Maxim DL ne permet pas de compenser efficacement les changements de vitesses de correction.
Détermination d’un champ adapté
La condition préalable à toute tentative d’autoguidage est de disposer d’une étoile guide correcte. Il faut pointer la lunette de manière à ce qu’une étoile suffisamment brillante soit présente sur le capteur de guidage de la caméra CCD. Dans la configuration optique utilisée (lunette TV-85, correcteur de champ et caméra ST-8XME), on peut typiquement aller jusqu’à la magnitude 10 avec un temps d’exposition de 3 secondes sur le capteur de guidage (à noter que le télescope spatiale Hubble utilise des étoiles guide de magnitude comprise entre 9 et 15 - on n’est donc pas si ridicule que ça !). Si l’on considère le champ fourni par notre configuration optique (1,5° environ sur l’imageur), il est généralement facile de trouver une étoile guide qui satisfait cette contrainte sur la magnitude.
La copie d’écran ci-dessous montre le champ de la galaxie NGC 2903 et une étoile guide de magnitude 8,8 (référence 1416-553-1 dans le catalogue Tycho-2) située dans le coin supérieur droit du capteur de guidage. A noter que le logiciel C2A pour Windows est utilisé pour réaliser les cartes de champs.
Comme montré sur cette copie d’écran, le logiciel C2A offre la possibilité d’afficher des repères de champ qui incluent le capteur de guidage (dans ce cas celui de la caméra SBIG ST-8XME), ce qui facilite grandement la recherche d’un champ adapté. Il est possible en particulier de réaliser des rotations et des symétries de champ de manière à s’adapter à la configuration optique utilisée. On voit ici que la galaxie est déplacée légèrement sur la gauche de l’imageur de la caméra de manière à placer une étoile guide de magnitude raisonnable dans le capteur de guidage. Ce déplacement ne pose pas de problème particulier puisque le correcteur de champ TeleVue permet d’obtenir un champ très plat sans coma significative sur les bords de champ.
Lancement de l’autoguidage
Une fois que toutes les étapes préliminaires ont été effectuées, on est alors prêt à lancer l’autoguidage et à réaliser les poses longues sur des objets du ciel profond. Comme indiqué dans le paragraphe précédent, il faut s’assurer qu’une étoile suffisamment brillante est présente dans le champ du CCD de guidage. Toutefois, contrairement à ce qui a été fait pour la calibration de l’autoguidage, il n’est pas nécessaire que cette étoile soit isolée, i.e. il peut y avoir d’autres étoiles plus brillantes ou de magnitude similaire dans le champ de guidage. Un temps de pose de 3 secondes permet quasiment systématiquement de trouver une étoile guide dans n’importe quelles conditions, quitte à déplacer légèrement l’objet cible dans le CCD de l’imageur comme indiqué précédemment.
A titre d’exemple, voici la courbe de suivi obtenue sur une pose individuelle de 15 minutes sur le champ de la galaxie NGC 2903 mentionnée plus haut. La dérive en ascension droite est tracée en bleu et celle en déclinaison en rouge. L’axe vertical est gradué en secondes d’arc.
On constate que globalement on reste dans un intervalle de 2 secondes d’arc durant toute la pose, sauf à quelques occasions où l’on observe un brusque changement de position de l’étoile guide. Ce phénomène est principalement dû à la « striction » des entraînements en ascension droite et déclinaison, et il se produit aléatoirement en fonction de la position relative des engrenages. Il est donc très difficile de faire beaucoup mieux que ce qui est montré ici avec la monture utilisée. Une solution pour améliorer la qualité de l’autoguidage consisterait à remplacer les pignons d’entrainement par des pignons de meilleure qualité ou bien par des entraînements à courroie.
On remarque aussi le rattrapage initial sur la position en ascension droite. C’est pour cela qu’il ne faut pas démarrer une prise de vue tout de suite après le lancement de l’autoguidage.
Résumé des paramètres et des réglages
Le tableau suivant résume l’ensemble des paramètres et des réglages utilisés pour le la monture Vixen GP-DX, le contrôleur SS2K 2000 PC et le logiciel Maxim DL.
Quelques images
L’image brute ci-dessous montre le champ de la galaxie NGC 2903. Il s’agit d’une pose unique de 15 minutes qui correspond à la courbe de suivi de guidage fournie dans le paragraphe précédent. Aucun pré-traitement ou traitement n’a été réalisé sur cette image et seuls les seuils de visualisation on été ajustés. Tous les paramètres indiqués dans cet article ont été utilisés pour la mise en oeuvre de l’autoguidage.
Cette image a été prise en plein centre de Toulouse avec un filtre anti-pollution LPS placé devant la caméra ST-8. On note sur cette image brute le fond de ciel brillant malgré la présence du filtre. Les étoiles les plus brillantes du champ sont saturées et provoquent du blooming sur les colonnes de pixels.
Une vue rapprochée montre que les étoiles sont bien rondes, du moins celles qui ne sont pas saturées. Les deux étoile les plus brillantes à gauche de la galaxie sont saturées et ont commencé à « bloomer » - c’est pour cette raison qu’elles apparaissent légèrement allongées verticalement.
L’image de la nébuleuse à tête de cheval (IC 434) ci-dessous a été prise avec la même configuration optique que celle décrite dans cet article. Elle a été assemblée à partir de 3 poses de 15 minutes autoguidées, ce qui donne un total de 45 minutes de pose. Les images ont été réalisées dans un site en bordure d’une petite ville avec quelques lampadaires aux alentours. Là aussi, les étoiles sont bien rondes.
Conclusion
Cet article montre qu’il est tout à fait possible de réaliser des poses longues en autoguidage sur des objets du ciel profond pour peu que l’on fasse preuve d’un peu de patience pour bien maîtriser tous les paramètres et réglages de sa configuration. Les composants matériels et logiciels utilisés dans la configuration décrite ici restent d’un prix relativement raisonnable et cela prouve que l’on peut donc se lancer dans la photographie numérique du ciel profond sans engager des investissements trop importants.
Il existe probablement de nombreuses façons d’améliorer encore les résultats présentés ici. C’est ce qui fait la beauté de l’observation astronomique !
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